Michel laissera-t-il sa place à Orbán à la présidence du Conseil de l’Europe ?

Michel laissera-t-il sa place à Orbán à la présidence du Conseil de l’Europe ?

À six mois des élections européennes et du grand mercato Bruxellois, l’annonce de Charles Michel de quitter son poste de Président du Conseil européen avant même que son remplaçant ne soit nommé crée des vagues, car l’intérim serait assuré par le tumultueux Premier ministre hongrois Viktor Orbán.

« Je vais mener la liste aux élections européennes. »  La phrase, entendue à chaque élection européenne, tous les cinq ans, de la part de dizaines de politiques dans les pays de l’Union, fait rarement de grandes vagues. Depuis le 6 janvier, cette phrase, prononcée par le président du Conseil européen Charles Michel, anime la scène bruxelloise jusqu’au plus haut niveau décisionnel de l’Union.

Pas tant pour le choix personnel de Charles Michel qui annonce prendre la tête de son parti libéral belge Mouvement Réformateur, mais pour ses conséquences.

En tant que tête de liste, Charles Michel est assuré d’obtenir un siège au Parlement européen, peu importent les résultats des élections européennes. Il serait donc contraint de quitter ses fonctions actuelles au plus tard mi-juillet, alors que son mandat de président du Conseil européen doit s’achever le 30 novembre 2024.

Les clés de l’Europe laissées à Orbán ?

Si Charles Michel quitte son poste en avance – soit cinq mois plus tôt que prévu – et qu’aucun remplaçant n’est nommé, il sera automatiquement remplacé par le chef d’Etat ou de gouvernement en charge de la présidence tournante du Conseil de l’UE. En l’occurence, ce serait au Premier ministre hongrois que reviendrait ce rôle.

« Ce scénario – un Orbán incontrôlé au pouvoir au Conseil pendant les six mois qui suivront immédiatement les élections européennes de 2024 – est l’un des scénarios que la plupart des 26 autres dirigeants des pays de l’UE chercheraient désespérément à éviter, étant donné l’escalade des tensions entre eux et Orbán, par exemple à propos du soutien de l’Union à la Hongrie et les violations de l’État de droit de la Hongrie » écrit Politico.

Le Premier ministre hongrois, réputé pour son euro-scepticisme, multiplie les initiatives à l’encontre de décisions européennes, à l’image de sa ‘consultation nationale’ lancée en Hongrie à l’automne 2023. Habitué au recours au veto au somment européen, il a notamment bloqué en décembre 2023 tout accord sur l’octroi de fonds à l’Ukraine et la révision du budget pluri-annuel de l’Union européenne.

Le Parlement européen sonne la charge

Depuis l’annonce de Charle Michel, diplomates et députés européens se sont mis en marche pour éviter un scénario qui permettrait, selon eux, à Viktor Orbán de bloquer les négociations, au moment où le compromis sera clé pour pour former une nouvelle Commission européenne et donner des orientations politiques majeures pour les années qui suivent.

La charge a été initiée par une pétition de l’eurodéputé finlandais Petri Sarvamaa, selon laquelle la Hongrie « a été critiquée à plusieurs reprises pour son érosion de l’État de droit, et surtout après les actions de la Hongrie visant à perturber le processus décisionnel des États membres lors du sommet européen en décembre, nous pensons que le moment est venu pour le Parlement européen de passer à l’action. »

Les députés européens ont donc adopté, jeudi 18 janvier, une résolution envisageant de priver Viktor Orbán de droit de vote au Conseil, en déclenchant l’article 7 du Traité de Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE).

Ce même article avait déjà été activé en 2018 pour les multiples violations de l’Etat de droit en Hongrie, avec pour conséquence principale le non-déboursement de fonds européens au pays.

Un faux sujet ?

Le son de cloche n’est pas vraiment le même à la Commission européenne, qui a récemment débloqué une tranche de 10 millions d’euros en faveur de la Hongrie. Une décision très critiquée au Parlement européen qui étudie désormais la possibilité de recourir à la Cour Européenne de Justice.

Pour de nombreux diplomates, il n’est pas nécessaire de s’affoler. Deux rendez-vous sont déjà programmés pour trouver un accord sur les « top jobs » (présidence de la Commission, du Conseil, Haut Représentant pour la politique étrangère, la sécurité et la défense) : une réunion informelle le 17 juin et un sommet les 28 et 29 juin.

Les 27 auront donc plus d’un mois pour se mettre d’accord après les européennes de juin. Et si aucun accord ne se dégage, une réunion supplémentaire pourrait être convoquée début juillet. De quoi éviter de laisser le siège de Charles Michel vacant trop longtemps.

RGPD*