Les acteurs institutionnels de l’Europe de la défense: qui fait quoi ? 1/3

Les acteurs institutionnels de l’Europe de la défense:                   qui fait quoi ? 1/3

L’Europe de la défense, ce n’est pas une politique de défense, ni la protection d’un territoire. C’est avant tout un projet politique, en constante évolution, visant à affirmer la place de l’Europe dans le monde, au service de sa politique étrangère.

Ce projet s’appuie sur une structure décisionnelle qui permet à l’UE de mener des opérations de gestion de crises, et qui veut désormais soutenir pleinement l’industrie de la défense. 

Pour comprendre le fonctionnement de cette Europe de la défense, il faut en connaître les acteurs.

Dans ce dossier, Sierra Tango vous explique le rôle et compétences des institutions européennes.

 

Le cénacle des 27

Notre premier article est dédié au « cénacle » des 27 Etats membres de l’Union européenne sous ses différents formats: le Conseil européen et le Conseil de l’Union européenne.

  • Le Conseil européen

  • Le Conseil de l'Union européenne

  • Au plus haut niveau politique, on retrouve le Conseil européen, où siègent les chefs d’Etats et présidents de l’UE. Ce sont eux qui fixent les stratégies communes, et les orientations générales.

    Le Conseil européen « identifie les intérêts stratégiques de l’Union, fixe les objectifs et définit les orientations générales de la politique étrangère et de sécurité commune, y compris pour les questions ayant des implications en matière de défense » définit l’article 25 du Traité de l’UE (TUE).

    Dans le passé, la défense était à l’agenda du Conseil européen une à deux fois par an. Désormais, cela arrive plus souvent.

    Notons que certains pays et dirigeants ont eu un rôle particulier d’impulsion mais la logique des négociations intergouvernementales, et donc l’unanimité, est la règle.

  • Le Conseil de l’UE partage le pouvoir d’initiative avec le Haut Représentant de l’Union (dont nous étudierons le rôle dans un article à venir).

    Une fois par mois, les ministres des Affaires étrangères des Etats membres se rencontrent pour traiter de l’ensemble des questions relatives à l’action extérieure de l’UE, y compris la Politique de Sécurité et de Défense Commune (PSDC). Leurs collègues de la défense les rejoignent, de manière informelle, deux fois par an.

    La  fonction du Conseil de l’UE est de prendre « les décisions nécessaires à la définition et à la mise en œuvre » de la PSDC, « sur la base des orientations générales et des lignes stratégiques définies par le Conseil européen ».

    Ce sont par exemple les ministres qui donnent le feu vert au lancement des missions et opérations militaires de l’UE, et décident de leur évolution.

    Les ministres adoptent également les sanctions européennes, ou encore valident, avec le Parlement européen, les règlements et textes législatifs (proposés en amont par la Commission européenne) permettant le lancement de nouvelles initiatives telles que le Fond Européen de Défense. 

Une défense européenne portée par un noyau dur d'Etats membres

 

Que ce soit au Conseil européen ou au Conseil de l’UE, les nouvelles politiques sont bien souvent impulsées par un noyau dur d’Etats membres. Il n’en reste pas moins que la participation, plus ou moins active, d’un large groupe d’États est essentielle pour inscrire les décisions prises dans la durée.

L’EXEMPLE DE LA COOPERATION STRUCTUREE PERMANENTE: UNE INITIATIVE DU COUPLE FRANCO-ALLEMAND

En juin 2016, la France et l’Allemagne donnent une nouvelle dynamique à la défense européenne en concevant un pacte européen de sécurité composé de 20 propositions. L’une d’entre elles est la création d’une coopération structurée permanente, ou PESCO, dont le but est d’accorder, à des groupements d’Etats membres, la possibilité de coopérer de manière renforcée – soit au-delà du socle commun européen – dans le domaine de la défense.

Au fil des négociations en Conseil des Affaires étrangères, la liste des pays souhaitant rejoindre la France et l’Allemagne dans cette initiative s’allonge progressivement, pour atteindre 23 Etats membres en juin 2017.

 

 

Officiellement lancée en juin 2017, la PESCO compte à ce jour 60 projets de coopération.

L’IMPLICATION D’UN CO-LEGISLATEUR: LE CAS DU FOND EUROPEEN DE LA DEFENSE

Le pacte présenté en 2016 inclut également le Fonds Européen de Défense, initiative portée de longue date par la France.

Après quelques mois de tractations entre les 27 Etats membres, le nouveau programme de financement est officiellement lancé en juin 2017. Celui-ci requiert toutefois une base juridique propre, impliquant un long processus des négociations entre le Conseil de l’UE et le co-législateur, le Parlement européen, sur base d’une proposition de la Commission européenne. Les textes juridiques seront donc adoptés au printemps 2021 et la première édition du Fond Européen de Défense connaîtra un franc succès avec 142 propositions déposées par près de 700 entités provenant de 26 Etats membres (voir notre article)

Notons que la volonté des représentants des Etats membres ne suffit généralement pas pour engager des dynamiques européennes d’envergure. Il leur faut bénéficier de l’impulsion du Haut représentant de l’Union européenne, dont le rôle sera décrit dans un prochain article.

Les organes techniques

Pour effectuer son travail, le Conseil de l’Union s’appuie sur trois principaux organes politico-militaires : 

  • Le Comité politique et de sécurité

  • Le Comité militaire de l’UE

  • L'état-major de l'Union européenne

  • Créé en 2000, c’est au sein du COPS que sont travaillées et élaborées les décisions de l’Europe de la défense par les ambassadeurs des Etats membres.

    Les ambassadeurs réalisent un travail discret, continu et central en amont de la prise de décision politique, incarnant la volonté de bâtir une culture du compromis. 

  • Le COPS s’appuie dans sa tâche sur le Comité militaire de l’UE (CMUE), composé des chefs d’État-major des Etats membres ou de leurs représentants militaires.

    Il fournit des recommandations et des avis sur les questions militaires, les missions et opérations envisagées, et approuve les « concepts » qui constituent la doctrine d’intervention de l’UE.

  • L’EMUE est la source de l’expertise militaire de l’Union.

    Il a trois fonctions principales : l’alerte rapide, l’évaluation des situations et la planification stratégique pour les missions de l’Union européenne.

    Il est également chargé de mettre en œuvre les politiques arrêtées et les décisions. A ce titre, il contribue en particulier au processus d’élaboration, d’évaluation et de réexamen des objectifs en termes de capacités militaires. 

Le CMUE et l’EMUE appartiennent formellement au Service européen pour l’action extérieure (SEAE), placé sous la houlette du Haut représentant et Vice-président de la Commission européenne. 

 

Suite et fin de notre dossier à lire prochainement.

RGPD*